Les orientations du troisième plan santé au travail (PST3)

Publié le 09/12/2015 par EP
PRST3
Feuille de route ambitieuse pour la période de 2016 à 2020, le PST3 inverse le paradigme classique privilégiant la notion de réparation, pose les bases d'un renforcement de la prévention primaire et sera accompagné d'un projet de réforme qui sera déposé par la ministre du travail début 2016. Le COCT a adopté mardi 8 décembre ce troisième plan santé au travail.

Traduite dans les termes de l'OMS (Organisation Mondiale de la Santé), " la prévention primaire désigne l'ensemble des actes destinés à diminuer l'incidence d'une maladie ou d'un problème de santé, donc à réduire l'apparition des nouveaux cas dans une population saine par la diminution des causes et des facteurs de risque ". Le troisième plan santé au travail marque une volonté politique majeure de favoriser et développer la prévention primaire pour sortir de la logique depuis longtemps admise de la réparation. Une politique de prévention anticipe les risques professionnels et travaille à améliorer la santé des salariés quand une vision portée sur la réparation mettra l'accent sur la résolution des problèmes une fois survenus.

Réfléchi et discuté depuis longtemps, ce plan écrit par les partenaires sociaux a été salué et jugé novateur par les membres du COCT (Conseil d'Orientation sur les Conditions de Travail), notamment les organisations syndicales et patronales, marquant en cela le résultat du dialogue social qui a prévalu à sa définition.

Deux constats majeurs ont été faits par le groupe permanent d'orientation du COCT :

  • Malgré une réelle compétence collective de la prévention portée par les acteurs de la santé au travail, la culture française de la gestion du risque est toujours peu portée sur la prévention, privilégiant la logique de réparation, qui mobilise une part importante des ressources, notamment de la branche AT-MP. Dans l'idée d'une politique nationale de santé voulant faire de la prévention un socle fondamental de l'action, il est nécessaire de renforcer la prévention effective des risques professionnels.
  • Le plan santé au travail n'est pas un plan de prévention des risques professionnels et n'a pas pour vocation de répertorier ces risques, mais de promouvoir le travail en faisant en sorte que celui-ci soit un facteur de santé des salariés, de prévention des risques organisationnels et d'efficacité dans la performance économique des entreprises.


Donner la priorité à la prévention primaire et développer la culture de prévention. Le premier axe stratégique proposé par le PST3 consiste à inverser l'ordre des priorités habituelles, sans remettre en cause la nécessité de la réparation, en travaillant au développement de la prévention :

  • Favoriser la prévention, en développant la connaissance des situations réelles, en renforçant l'évaluation des risques, en démontrant que les investissements dans la santé et la sécurité au travail sont effectivement rentables* (lire la communication de la commission au parlement européen) , en identifiant les spécificités des PME et TPE, en renforçant la formation initiale et continue en santé sécurité au travail et en management du travail.
  • Prévenir l'usure professionnelle et la pénibilité, accompagner les entreprises pour anticiper le vieillissement des actifs.
  • Cibler des risques professionnels prioritaires du fait de leur impact important sur les AT-MP : l'exposition aux risques chimiques, les chutes de hauteur et de plain-pied, les risques psychosociaux, le risque routier professionnel. 

Améliorer la qualité de vie au travail, levier de santé, de maintien en emploi des travailleurs et de performance économique et sociale de l'entreprise. Second axe stratégique porté par le PST3, la démarche QVT est un outil de moyen et long terme qui désigne les actions qui permettent de concilier à la fois l’amélioration des conditions de travail pour les salariés et la performance globale des entreprises, d’autant plus quand leurs organisations se transforment.

  • Favoriser la qualité de vie au travail en valorisant le développement d'un management de qualité et en mettant les technologies numériques à son service.
  • Assurer le maintien en emploi et prévenir la désinsertion professionnelle.
  • Promouvoir un environnement de travail favorable à la santé, par la prévention des conduites addictives au travail et des maladies cardio-vasculaires en lien avec l'activité professionnelle, en établissant une collaboration et un cadre d'action partagé entre les acteurs de la santé sur le territoire.

Afin de mettre en œuvre ces axes stratégiques, le PST3 propose de renforcer le dialogue social et les ressources de la politique de prévention en structurant un système d'acteurs, notamment en direction des TPE-PME. Pour cela, le plan propose de placer le dialogue social au cœur de la politique de santé au travail, de constituer un réseau coordonné d'acteurs de la prévention, de développer une offre régionale de services en direction des PME et TPE (notamment via le réseau Anact-Aract), de simplifier l'environnement normatif au bénéfice d'une plus grande effectivité de la prévention, de renforcer les connaissances et les systèmes de données, de poursuivre et valoriser la recherche en santé sécurité au travail.

Pour mettre en œuvre cette politique de prévention sur le terrain au plus près des entreprises, le PST3 souhaite renforcer les acteurs de la prévention en entreprise, notamment par :
 

  • le renforcement des missions et de l'action des services de santé au travail,
  • la valorisation des compétences des représentants du personnel en matière de conditions de travail, en mobilisant notamment les commissions paritaires régionales interprofessionnelles.

Myriam El Kohmri, ministre du travail, a annoncé, dans son discours introduisant le PST3, la nouvelle orientation prise vers la prévention primaire, soulignant qu'elle souhaite réformer la santé au travail en lui donnant " les moyens de mieux fonctionner dans un cadre rénové […] l'objectif (n'étant) évidemment pas moins de protection ou de suivi mais un suivi plus intelligent, plus effectif ". Elle a annoncé qu'elle présenterait début 2016 un projet de loi qui ambitionnera d'aller plus loin que la loi Rebsamen dans la réforme de la santé au travail.

 

 

* Les politiques de prévention constituent un domaine d’investissement rentable, y compris sous un angle purement financier : c’est ce que les anglo-saxons appellent le ROP, le retour sur politiques de prévention. Un ROP supérieur à 1 dénote un investissement rentable. Le cadre stratégique européen mentionne que « selon des estimations récentes, (les politiques de prévention) peuvent en effet générer d’importants rendements, équivalant en moyenne à 2,2. (...), tandis que les coûts occasionnés par les arrêts dus à des maladies liées au travail atteignent des proportions inacceptables ».


Télécharger le pdf du troisième plan santé au travail (PST3).
 


 

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